Le régime fiscal des associations sportives en France est un sujet complexe qui soulève de nombreuses questions pour les dirigeants et trésoriers. Entre exonérations, franchises et obligations déclaratives, il n’est pas toujours aisé de s’y retrouver. Cet article fait le point sur les principales règles fiscales applicables aux clubs et fédérations sportives, en détaillant les différents impôts concernés et les conditions à remplir pour bénéficier d’avantages fiscaux. Des exemples concrets illustreront les situations les plus courantes rencontrées par les associations sportives.
Les principes généraux de la fiscalité des associations sportives
Le régime fiscal des associations sportives repose sur plusieurs principes fondamentaux qu’il convient de bien comprendre. Tout d’abord, les associations régies par la loi de 1901 bénéficient en principe d’une présomption de non-lucrativité. Cela signifie qu’elles ne sont pas soumises aux impôts commerciaux (impôt sur les sociétés, TVA, contribution économique territoriale) sauf si leur gestion est intéressée ou si elles exercent leur activité dans des conditions similaires à celles d’une entreprise.
Cependant, cette présomption peut être remise en cause par l’administration fiscale qui examinera la situation au cas par cas selon la méthode dite des « 4P » : Produit, Public, Prix et Publicité. Si l’association exerce son activité dans des conditions proches du secteur concurrentiel, elle pourra être assujettie aux impôts commerciaux sur tout ou partie de ses activités.
Par ailleurs, les associations sportives peuvent bénéficier de nombreuses exonérations spécifiques prévues par le Code général des impôts. Ces exonérations concernent notamment :
- Les recettes tirées de 6 manifestations de bienfaisance ou de soutien par an
- Les recettes des cantines et buvettes dans certaines limites
- Les cotisations des membres
- Les subventions publiques
Enfin, il faut souligner que le régime fiscal dépend beaucoup de la nature des activités exercées par l’association sportive. Une distinction importante est faite entre les activités d’enseignement et d’encadrement sportif d’une part, et les prestations annexes d’autre part (vente de matériel, organisation de voyages, etc.).
L’impôt sur les sociétés et les associations sportives
L’impôt sur les sociétés (IS) est l’un des principaux impôts commerciaux auxquels peuvent être soumises les associations sportives. En principe, les associations à but non lucratif en sont exonérées. Toutefois, elles peuvent y être assujetties dans certains cas :
– Si elles exercent des activités lucratives au sens fiscal
– Si elles perçoivent certains revenus du patrimoine (revenus fonciers, revenus de capitaux mobiliers)
Concernant les activités lucratives, l’administration fiscale applique la règle dite de « prépondérance« . Si les activités non lucratives restent prépondérantes, seules les activités lucratives seront imposées à l’IS. En revanche, si les activités lucratives deviennent prépondérantes, c’est l’ensemble des activités de l’association qui sera soumis à l’IS.
Il existe toutefois des franchises et seuils qui permettent aux petites associations sportives d’échapper à l’imposition :
- Franchise des activités lucratives accessoires : exonération si les recettes d’activités lucratives n’excèdent pas 72 432 € par an
- Seuil de la franchise des impôts commerciaux : 73 518 € de recettes d’activités lucratives
Au-delà de ces seuils, l’association devra sectoriser ses activités lucratives ou créer une filiale commerciale pour les exercer.
Le taux d’IS applicable aux associations est en principe le taux normal de 25%. Cependant, un taux réduit de 15% s’applique sur la première tranche de 38 120 € de bénéfice pour les associations dont le chiffre d’affaires est inférieur à 10 millions d’euros.
Exemple pratique
Un club de tennis perçoit 100 000 € de cotisations, 50 000 € de recettes de son école de tennis, et 30 000 € de ventes d’articles de sport. Seules ces dernières sont considérées comme lucratives. Le club bénéficiera de la franchise des activités lucratives accessoires car 30 000 € < 72 432 €. Il ne sera donc pas soumis à l'IS.
La TVA et les associations sportives
La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est un autre impôt commercial majeur auquel peuvent être assujetties les associations sportives. Comme pour l’IS, le principe est l’exonération pour les activités non lucratives. Mais dès lors qu’une association réalise des opérations entrant dans le champ d’application de la TVA et ne bénéficiant pas d’une exonération spécifique, elle devient redevable de la taxe.
Les principales opérations soumises à la TVA pour une association sportive sont :
- Les ventes de biens (matériel sportif, boissons, etc.)
- Les prestations de services à caractère sportif (cours, stages, locations)
- L’organisation de manifestations sportives payantes
À l’inverse, sont exonérées de TVA :
- Les cotisations des membres
- Les subventions non imposables
- Les recettes de 6 manifestations de bienfaisance par an
Il existe par ailleurs une franchise en base de TVA qui exonère les petites associations dont le chiffre d’affaires n’excède pas :
- 85 800 € pour les ventes de biens
- 34 400 € pour les prestations de services
Au-delà de ces seuils, l’association devient redevable de la TVA sur l’ensemble de ses opérations imposables. Elle doit alors facturer la TVA à ses clients et la reverser à l’administration fiscale, mais peut en contrepartie récupérer la TVA sur ses achats.
Les taux de TVA applicables aux activités sportives sont :
- 5,5% pour les droits d’entrée dans les installations sportives
- 10% pour les activités physiques et sportives
- 20% (taux normal) pour les autres opérations
Cas particulier des manifestations sportives
L’organisation de compétitions ou spectacles sportifs payants relève en principe de la TVA. Toutefois, les associations sportives bénéficient d’une exonération pour les recettes de billetterie des manifestations sportives qu’elles organisent. Cette exonération est limitée à 6 manifestations de bienfaisance ou de soutien par an.
Les autres impôts et taxes applicables aux associations sportives
Outre l’IS et la TVA, les associations sportives peuvent être redevables d’autres impôts et taxes en fonction de leur situation :
Contribution économique territoriale (CET) : Elle remplace l’ancienne taxe professionnelle et se compose de deux éléments :
- La cotisation foncière des entreprises (CFE)
- La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE)
Les associations non lucratives en sont en principe exonérées. Mais celles qui exercent une activité lucrative peuvent y être assujetties, avec toutefois des exonérations possibles (ex : pour les activités d’enseignement).
Taxe sur les salaires : Les associations qui ne sont pas assujetties à la TVA sur au moins 90% de leur chiffre d’affaires doivent payer la taxe sur les salaires. Son taux varie de 4,25% à 13,60% selon le niveau de rémunération. Il existe toutefois un abattement annuel de 21 381 € qui exonère de fait les petites associations.
Taxe d’habitation et taxe foncière : Les locaux des associations sportives peuvent être soumis à ces taxes. Des exonérations sont prévues pour les équipements sportifs, mais pas pour les locaux administratifs ou commerciaux.
Taxe sur les spectacles : Elle s’applique aux réunions sportives organisées par les associations. Son taux varie de 8% à 14% des recettes. Là encore, des exonérations existent pour les petites manifestations.
Focus sur la taxe d’apprentissage
Les associations sportives qui emploient des salariés sont en principe assujetties à la taxe d’apprentissage. Toutefois, celles qui ne sont pas soumises à l’IS en sont exonérées. Le taux de cette taxe est de 0,68% de la masse salariale, avec des exonérations possibles pour les associations employant des apprentis.
Les obligations déclaratives et comptables des associations sportives
Le régime fiscal des associations sportives s’accompagne d’un certain nombre d’obligations déclaratives et comptables qu’il est impératif de respecter :
Déclaration d’existence : Toute association qui devient imposable aux impôts commerciaux doit souscrire une déclaration d’existence auprès du service des impôts des entreprises dans les 15 jours du début de son activité imposable.
Déclarations fiscales : Les associations assujetties aux impôts commerciaux doivent déposer des déclarations périodiques :
- Déclaration annuelle de résultats pour l’IS
- Déclarations mensuelles ou trimestrielles pour la TVA
- Déclaration annuelle pour la CET
Facturation : Les associations assujetties à la TVA doivent respecter les règles de facturation prévues par le Code général des impôts (mentions obligatoires, numérotation, etc.).
Comptabilité : Les associations fiscalisées doivent tenir une comptabilité conforme au plan comptable général. En cas de coexistence d’activités lucratives et non lucratives, une comptabilité distincte doit être mise en place.
Conservation des documents : Les pièces justificatives relatives aux opérations ouvrant droit à déduction de TVA doivent être conservées pendant 6 ans. Les autres documents comptables doivent être gardés pendant 10 ans.
Le cas particulier des reçus fiscaux
Les associations sportives peuvent délivrer des reçus fiscaux à leurs donateurs, ouvrant droit à une réduction d’impôt. Cette faculté est soumise à des conditions strictes :
- L’association doit être d’intérêt général
- Le don doit être désintéressé
- L’activité de l’association ne doit pas être lucrative
- La gestion doit être désintéressée
Les reçus fiscaux doivent être établis selon un modèle précis (formulaire Cerfa n°11580*04) et conservés en cas de contrôle.
Stratégies d’optimisation fiscale pour les associations sportives
Face à la complexité du régime fiscal des associations sportives, plusieurs stratégies peuvent être mises en œuvre pour optimiser la situation fiscale tout en restant dans la légalité :
Sectorisation des activités lucratives : Cette technique permet d’isoler comptablement et fiscalement les activités lucratives des activités non lucratives. Seules les premières seront alors soumises aux impôts commerciaux, à condition que les activités non lucratives restent prépondérantes.
Filialisation des activités commerciales : La création d’une filiale sous forme de société commerciale peut être pertinente lorsque les activités lucratives prennent de l’ampleur. Cela permet de préserver le statut fiscal de l’association mère.
Recours au mécénat : Les dons et le mécénat d’entreprise offrent des avantages fiscaux intéressants tant pour l’association que pour les donateurs. Il convient toutefois de bien respecter les conditions d’éligibilité.
Optimisation de la TVA : Une réflexion sur les taux de TVA applicables et sur la récupération de la TVA sur les achats peut permettre de réaliser des économies substantielles.
Choix du régime d’imposition : Dans certains cas, opter volontairement pour l’assujettissement aux impôts commerciaux peut s’avérer avantageux (ex : pour récupérer la TVA).
Exemple d’optimisation
Un club de football amateur réalise 80 000 € de recettes de son école de foot (non lucratif) et 40 000 € de ventes de produits dérivés (lucratif). En sectorisant son activité lucrative, il échappera à l’IS grâce à la franchise des activités lucratives accessoires (40 000 € < 72 432 €). Sans sectorisation, l'ensemble de ses activités aurait été soumis à l'IS.
En définitive, le régime fiscal des associations sportives est un sujet complexe qui nécessite une analyse approfondie au cas par cas. Les dirigeants associatifs ont tout intérêt à bien maîtriser ces règles pour optimiser leur situation fiscale tout en restant dans la légalité. Un accompagnement par un expert-comptable ou un avocat fiscaliste peut s’avérer précieux pour naviguer dans ces eaux parfois troubles de la fiscalité associative.

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